Fatimata est Cheffe de projet au sein du RECOPA (Réseau de Communication sur le Pastoralisme), partenaire incontournable d’Acting for Life (AFL) au Burkina Faso. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, elle a accepté de nous en dire plus sur son parcours inspirant.
« J’ai rencontré beaucoup de difficultés, qui ne m’ont pas empêché d’avancer mais qui au contraire m’ont forgé. »
Fatimata a toujours nourri le rêve de défendre les intérêts des autres. C’est donc tout naturellement que la jeune femme s’est orientée vers des études de droit, souhaitant dans un premier temps devenir avocate. Après quatre années de travail acharné, elle a obtenu sa maîtrise de sciences juridiques et politiques à l’université de Ouagadougou, non sans quelques difficultés. Elle raconte : « Chez nous les études de droit sont plutôt réservées aux hommes ». Ainsi, tout au long de son parcours académique, Fatimata a dû faire face au scepticisme de certains proches et camarades de classe. La jeune femme se remémore : « Au sein même de la formation, les hommes ne croyaient pas que les femmes pouvaient évoluer dans ce domaine. Les études de droit nécessitent beaucoup de lecture et d’implication, ce qui n’est pas forcément facile à gérer avec les tâches ménagères. »
Aurais-tu un conseil pour les femmes qui souhaiteraient marcher dans tes pas ?
« La confiance en soi c’est la clé, il faut se dire qu’on peut le faire. Ces études ne sont pas plus difficiles que d’autres, comme beaucoup semblent le penser ».
Pourquoi avoir choisi le secteur associatif ?
La raison principale pour laquelle Fatimata souhaitait exercer le métier d’avocate était que cela l’amènerait à défendre les droits des populations. Issue du milieu du pastoralisme, elle se rend vite compte qu’en intégrant le domaine de l’agropastoralisme avec le RECOPA, elle pourrait atteindre son objectif premier, celui de défendre les droits et dans ce cas précis ceux des pasteurs.
En quoi consiste le métier de Cheffe de projet ?
Fatimata a intégré le RECOPA en tant qu’enquêtrice où elle a eu à mener des enquêtes au compte de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture). Puis, elle a rapidement évolué au poste d’animatrice terrain pour enfin devenir cheffe de projet au bout de 4 ans. Une évolution d’autant plus impressionnante que Fatimata fait à présent partie des décideurs. En effet, en plus de gérer les programmes (planification, accompagnement des animateurs, contact avec les différents prestataires), elle intervient aussi dans les prises de décision qui concernent et orientent l’ONG elle-même. La jeune femme se confie « Je pense que j’ai eu la chance de faire du terrain, ça m’a permis aujourd’hui d’avoir deux visions : celle du terrain et celle qu’ont les décideurs. »
« Ça rejoint ce que je voulais faire : aider et défendre les droits des gens. Je ne suis pas devenue avocate, mais j’ai réalisé mon rêve ».
Qu’est-ce qui te plaît dans le métier de Cheffe de projet ?
« Ce qui me plaît c’est la proximité avec nos communautés. Le regard externe n’a rien à voir avec le fait de travailler avec eux, de vivre avec eux, d’avoir une vision commune et un objectif commun à atteindre. Le bonheur, on l’a quand c’est avec les autres », affirme Fatimata. Avant de rejoindre le RECOPA, la jeune femme reconnait qu’elle avait peu de liens avec les communautés rurales. Vivre avec eux leur réalité lui a permis de trouver sa place.
Es-tu amenée à faire face à certaines difficultés dans ton travail ?
Fatimata admet qu’une certaine « dominance masculine » reste ancrée dans la société burkinabè au cœur de laquelle, tant le genre que l’âge peuvent s’avérer compliqués à gérer. En effet, en tant que jeune femme, il est difficile pour elle de contredire ses aînés. Toutefois, elle reconnait que ces difficultés sont atténuées par le soutien que ses formateurs lui ont témoigné tout au long de sa carrière : « J’ai la chance de travailler avec les Responsables du RECOPA qui m’ont beaucoup soutenu. C’est grâce à eux que j’en suis arrivée là, ils n’ont ménagé aucun effort et m’ont permis d’avancer ».
Raconte-nous une anecdote qui t’a marqué :
« Quand j’étais encore animatrice, je devais régulièrement me rendre sur le terrain auprès des populations soutenues par nos actions. Une fois, alors que j’attendais que tout le monde arrive pour débuter la réunion, un homme s’est plaint que l’animateur était en retard. Bien sûr, il était habitué à faire face à des animateurs et pas à des animatrices ! J’ai alors commencé à rire, et je lui ai dit que j’étais l’animatrice. Dans un premier temps, il m’a dit que ça n’était pas possible puis il a fini par me croire ». Fatimata précise qu’aujourd’hui, elle a gardé de bonnes relations avec ce monsieur et rit avec lui lorsqu’ils se remémorent cet épisode.
Selon elle, les personnes appuyées par les projets ont l’habitude d’être confrontées à des hommes, notamment à cause des grandes distances (160 km dans cet exemple) à parcourir en moto. Elle ajoute : « Les gens ont tendance à penser qu’il y a certaines choses qu’on ne peut pas confier à la femme, ce sont des stéréotypes en fait ».
Quelle relation as-tu avec Acting for Life et ses équipes ?
« Je peux dire qu’Acting for Life a fortement contribué à mon évolution », affirme la jeune femme. Lorsqu’elle s’est vue proposer le poste de Cheffe de projets par le Responsable du RECOPA, Fatimata a vu le doute l’envahir : « je me demandais si j’allais y arriver ». Selon elle, c’est grâce aux conseils d’une de ses collègues d’Acting for Life qu’elle a sauté le pas : « elle m’a rassuré et m’a rappelé que je n’étais pas seule, que le RECOPA était derrière moi et qu’AFL l’était aussi ».
Quant au partenariat à proprement parlé entre le RECOPA et Acting for Life, Fatimata conclut : « Lorsqu’on va en réunion avec AFL, j’ai l’impression d’être avec des équipes du RECOPA. Il n’y a pas de distance. On a l’impression que c’est la même organisation parce qu’on défend les mêmes choses, c’est une collaboration très franche qu’il y a entre AFL et nous. On est face à des gens qui ont le même objectif, on construit tout ensemble, c’est ça qui fait la beauté de cette coopération ». Aujourd’hui, Fatimata accompagne notamment les équipes d’Acting for Life dans le cadre du PROFIL II – Projet d’appui à la Formation et l’Insertion socioéconomique des jeunes.